Besançon – le meeting de Philippe Poutou attaqué par des néonazis
Depuis le meeting de Zemmour à Villepinte le 5 décembre, et l’agression menée par le groupuscule néo-nazi Les Zouaves envers les militant-e-s de SOS-Racisme, il semblerait que les milices d’extrême droite se sentent pousser des ailes; comme le prouvent les récentes agressions qui ont eu lieu ces deux dernières semaines : à la maison des syndicats de Strasbourg le 25 février (voir article Rue89 Strasbourg), à Rennes le 23 février (voir article d’ Expansive.info), le 22 février à Aix En Provence, un étudiant est attaqué lors d’une distribution alimentaire (voir article de La Marseillaise).
Hier soir, c’est à Besançon que nos fachos locaux ont frappés. Notre camarade Toufik de Planoise qui se trouvait sur place, au meeting électoral de Philippe Poutou candidat du NPA, décrit l’évènement dans un article paru sur le média Kawa TV (Besançon – le meeting de Philippe Poutou attaqué par des néonazis), et que nous reprenons ci-dessous…
Alors que candidat anticapitaliste haranguait les foules ce mardi 9 mars à Besançon, une formation ultranationaliste a tenté de s’attaquer à son meeting. La soirée n’aura finalement pas souffert de l’incident : les mis en cause, peinant à violenter un participant plus résistant que prévu, ont préféré fuir à l’arrivée de la sécurité. Deux suspects ont toutefois été identifiés, le premier étant membre d’un groupuscule néonazi et le second militant actif de Génération Zemmour. Un assaut qui survient quelques jours après un précédent, impliquant les mêmes individus cette fois à la sortie d’une réunion Mélenchoniste… quid d’une chasse aux « gauchistes » dans la capitale comtoise ?

« Ils étaient venus pour en découdre. »
Hier au kursaal de Besançon, l’effervescence était de mise. Plusieurs centaines de personnes se sont massées au sein du bâtiment, afin de vibrer avec Philippe Poutou. Discours, applaudissements, rigolades, tout se passe pour le mieux. Jusqu’au moment où Alex sort quelques instants afin de téléphoner, aux environs de 21h30. Sept individus font subitement irruption et s’approchent du parvis principal, commençant à arracher les visuels disposés pour baliser l’événement. Le jeune homme, surpris, leur demande ce qu’il leur prends d’agir ainsi. Un protagoniste se détache en lui demandant «t’aimes Poutou ?», ce à quoi il réponds par la positive.
Pour seule réaction, il recevra des menaces et l’ordre de «manger l’affiche.» Il refuse. Immédiatement, les coups pleuvent. «J’ai réussi à me reculer, à enlever mon manteau, puis à me mettre en position de garde. Mon agresseur m’a alors exhorté à poursuivre le combat dans un coin isolé des caméras et des regards, m’indiquant qu’il ne voulait pas être filmé ou dérangé. Bien sur, j’ai décliné. Il a poursuivi les crochets, a tenté de me faire tomber. Sans succès. C’est à ce moment là que la sécurité est arrivée, et qu’il a fuit avec le reste de sa bande. Ils étaient venus pour en découdre.» Sollicités, les services de police sont dépêchés pour prendre les fuyards en chasse.
Cocarde Étudiante, Génération Zemmour, Vandal Besak…
Un membre du NPA raconte : «Dès que nous avons compris ce qu’il se passait, nous sommes intervenus. Fidèles à leur réputation, les nazillons ont pris leurs jambes à leur cou. Nous avons pris en charge le camarade, et nous nous sommes assurés qu’il allait bien.» Alex pâtit d’hématomes et de tuméfactions, mais n’est pas gravement blessé. À l’intérieur rien ne filtre de ce qui vient de se produire, beaucoup n’apprenant les tenants et aboutissants de cet incident que bien après. Une actualité qui choque et scandalise, même chez les soutiens les moins fervents du trotskysme. «C’est la démocratie qu’on attaque», lance par exemple un social-démocrate.
Mais place du Théâtre, on s’active sans tarder à recouper les premiers éléments disponibles. Il s’avère que les auteurs présumés n’ont pas hésité à signer ostensiblement leur opération, des autocollants de la Cocarde Étudiante, de Génération Zemmour, et des Vandals Besak ayant été collés dans les parages par leurs soins. Surtout les deux principaux auteurs ont été rapidement identifiés par un témoin direct, vite corroboré par plusieurs autres : il s’agit d’Alexandre Meuret et de Théo Giacone, le premier ayant été interpellé et placé en garde-à-vue, quand le second s’était vanté le jour-même de son futur forfait dans une allusion à peine voilée sur Instagram.
Une agression similaire quelques jours plus tôt.
Néanmoins ces brutalités ne sont pas inédites. Le mardi 1er mars sur le même site, c’est « l’Union Populaire » qui proposait un rendez-vous électoral, notamment avec François Ruffin, Leïla Chaibi et Sébastien Jumel. Accompagné de plusieurs connaissances, j’étais aussi parmi les spectateurs. Si dés le début j’ai remarqué et signalé l’entrée de trois partisans d’ultra-droite, ceux-ci se sont engagés à ne pas faire d’esclandres et s’y sont tenus. Je suis parti à la fin de soirée vers 22h45, accompagné d’une amie. Quinze minutes plus tard place Louis Pasteur, nous avons croisé une formation de cinq personnes. C’est là que cris, pistage, puis menaces se sont abattus.
En tant qu’instigateurs, on retrouvait, enivrés, Alexandre Meuret et Théo Giacone. Ils promettent, longuement, de me « péter la gueule » lorsque les circonstances le permettront. En étant au cœur de la Grande-Rue, le réseau de vidéosurveillance a sans doute calmé l’ardeur des intéressés. Pour cette fois. Mais ceux-ci furent visiblement très au fait des mes allées et venues, comme le confirme un tiers. « Je connais un des membres du trio qui était dans la salle, il m’a demandé dans l’après-midi si tu allais venir. » Tous naviguent dans la fachosphère, des clichés les faisant apparaître avec… Meuret et Giacone. Préméditation et guet-apens ne font guère de doute.

Meuret et Giacone, bis repetita.
Concernant le parcours des lieutenants, il s’inscrit pleinement dans ce panorama. Alexandre Meuret, vingt-quatre ans, est un militant des « Vandal Besak », groupuscule paramilitaire néonazi impliqué dans de nombreuses exactions dans la région. Sur les réseaux sociaux, ses photographies alternent poses avec une réplique d’arme de guerre et archives bucoliques de soldats nazis en détente dans la capitale comtoise (voir ici). Quant à Théo Giacone, vingt-deux ans, il fut un cadre du Rassemblement National, avant d’en être viré pour ses amitiés sulfureuses, dont avec le précédent. Il a depuis rallié Zemmour et la Cocarde Étudiante, suscitant la controverse au sein de l’Université de Franche-Comté.
Ces deux affaires illustrent-elles les balbutiements de commandos, structurés, organisés, préparés, visant à instituer des « expéditions punitives » et autres « chasses aux gauchistes » sur Besançon ? En tout cas, les velléités en la matière ne sont malheureusement pas nouvelles. Les « Vandal Besak » étaient dernièrement engagés dans le mouvement d’opposition au passe sanitaire, avec des dossiers déjà entamés les 17 juillet et 14 août 2021. L’instruction, toujours ouverte, court depuis désormais près de huit mois, malgré les preuves flagrantes et multiples. Le Procureur de la République, Étienne Manteaux, veut t-il seulement considérer ces infractions avec gravité ?